Le travail photographique de TONIO, alias Seung-Hwan Oh, explore la disparition
progressive de l’image. Dans un monde saturé de représentations visuelles, il choisit au contraire de les altérer, de les laisser s’effacer.
Sa série Impermanence utilise un procédé unique : il cultive des microbes qu’il applique sur la pellicule photographique, entraînant une lente décomposition de l’image. Le résultat : des portraits partiellement effacés, rongés par le temps et la matière, qui évoquent la fragilité de la mémoire et la condition humaine.
Cette démarche, fruit de près de dix ans de recherche, échappe en partie au contrôle de
l’artiste. Ce qu’il propose, ce n’est pas une maîtrise froide de la technique, mais un abandon poétique au chaos, rendant les visages vulnérables et émouvants. Le parallèle avec Le Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde est saisissant : comme le tableau de Dorian, ces photographies deviennent des archives du temps qui passe, défigurées par leur propre durée.
Oh rejoint ainsi la tradition des vanités picturales européennes, en proposant une réflexion contemporaine sur l’impermanence. Comme les natures mortes d’autrefois, ses portraits décomposés rappellent la précarité de l’existence. Ils rejoignent aussi les analyses de Susan Sontag et Roland Barthes sur la photographie comme trace du passé, empreinte d’absence et de deuil. En dissolvant l’image, Seung-Hwan Oh défie sa sacralité et nous confronte à notre propre finitude.